BIENVENUE SUR LA VINGT-DEUXIEME EDITION DES JEUDIS NATURA 2000 GARONNE EN OCCITANIE !
Des lâchers d’eau bénéfiques aussi à la biodiversité !
Le SMEAG organise les réalimentations en eau de soutien d’étiage de la Garonne afin de maintenir les niveaux d’eau nécessaires pour éviter les conflits entre usages et la détérioration du milieu aquatique. L’étiage précoce et intense 2022 est susceptible d’impacter malheureusement la biodiversité des sites Natura 2000 en Occitanie. Le soutien d’étiage limite l’érosion des débits naturels due au changement climatique.
L’étiage est la période de l’année pendant laquelle le niveau d’eau (mesuré en débit) est le plus bas. En général, il intervient au moment où les apports naturels (précipitations) sont les plus faibles, donc en été. En Garonne, l’étiage s’observe en général, après la fonte des neiges (mi-juillet), jusqu’aux première pluies (ou neiges) de la fin octobre, voire se prolonge jusqu’au milieu de l’hiver (on parle alors d’étiage nival lié à la présence de la neige).
Une action de soutien d’étiage
Depuis l’été 1993, la Garonne bénéficie, entre le 1er juillet et le 31 octobre, de réalimentations en eau de soutien d’étiage. Le dispositif s’appuie principalement sur les lacs hydroélectriques des Pyrénées et depuis 2020 sur des retenues du Tarn. Son efficacité s’observe tout le long du fleuve, jusqu’à l’estuaire de la Gironde.
Les opérations permettent de réduire de moitié les situations de tension autour de la ressource en eau et les restrictions de prélèvements et d’usages. Toutefois, les moyens actuels ne permettent pas de garantir totalement les débits d’objectif d’étiage (DOE) fixés. C’est dans une volonté de diversification et d’efficacité du soutien d’étiage que le plan de gestion d’étiage (PGE) Garonne-Ariège 2018-2027 recherche la mobilisation d’autres ressources en France ainsi que dans le Val d’Aran.
Le soutien d'étiage peut représenter jusqu'à 50 % des débits du fleuve dans la traversée de Toulouse et jusqu'à 70 % du débit de son affluent, l'Ariège, en amont de Toulouse.
La Garonne n’étant pas dotée de réserves en eau dédiées au soutien d'étiage, des accords transitoires de coopération ont été renouvelés avec les gestionnaires de réserves existantes. En parallèle, le PGE Garonne-Ariège a été révisé pour la période 2018-2027. Il propose une panoplie d'actions en faveur de l'étiage du fleuve et présente une triple vocation :
- Un outil de gestion qui facilite la prise de décisions pour la gestion annuelle des étiages ;
- Un outil de prévision décennale dans un contexte d'adaptation nécessaire aux changements climatiques ;
- Un outil de partage de l'information et de cohérence inter-bassin qui doit faciliter les prises de décision à l'échelle locale, interrégionale et interbassin.
Enfin, l'instauration au 1er trimestre 2014 de la redevance pour service rendu, dite de Gestion d'étiage, permet de pérenniser le financement des actions figurant au PGE Garonne-Ariège, dont le soutien d'étiage.
Ressource pour le soutien d’étiage en 2022 - Source : SMEAG
Les acteurs de la démarche
Ce dispositif s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre du Sdage Adour-Garonne et du PGE Garonne-Ariège. Un comité stratégique de gestion du soutien d’étiage, présidé par le préfet coordonnateur du sous bassin de la Garonne et le président du SMEAG, fixe chaque année les objectifs stratégiques du soutien d’étiage et valide les bilans de campagne. Il associe le SMEAG, les services de l’État et de l’Agence de l’eau Adour-Garonne, les gestionnaires des ressources conventionnées, les trois organismes uniques désignés par l'État pour la gestion de l'eau agricole (DUGC) et des représentants de chacune des quatre grandes catégories d’usagers (agriculture, industrie, eau potable, navigation).
Un étiage de plus en plus précoce
La vague caniculaire depuis début juin a accéléré la fonte de la neige pyrénéenne, pourtant abondante cet hiver, précipitant le fleuve Garonne dans une entrée en étiage précoce. Le SMEAG, aux côtés de ses partenaires, l’État, l'Agence de l'eau Adour-Garonne et les gestionnaires des réserves en eau, a anticipé et préparé plusieurs accords de coopération pour le soutien d’étiage du fleuve qui sécurisent et renforcent les moyens existants afin de garantir l'eau nécessaire cet été et cet automne aux activités.
Etiage sur la Garonne juillet 2022 - Source : SMEAG
Les 20 et 21 juin 2022, la Garonne a franchi de façon très précoce son objectif d’étiage à Lamagistère et Tonneins (47). Un franchissement très rare à cette époque car rencontré seulement quatre fois en soixante ans à Tonneins : 1989, 2006, 2017 et maintenant juin 2022.
Cela augurait d’un étiage 2022 long et intense. La fonte précoce de la neige dans les Pyrénées et l’absence de pluies ont conduit à des lâchers de soutien d’étiage dès le 9 juillet.
Les débits observés en Garonne amont en août sont ceux généralement observés fin septembre. Le tarissement de la Garonne amont est précoce et important.
La situation était prévisible avec les dérèglements annoncés du climat.
Ce sont 79 millions de mètres cubes d’eau, soit l’équivalent de 32 000 piscines olympiques, qui sont mobilisables du 1er juillet au 31 octobre depuis quatorze retenues, essentiellement hydroélectriques gérées par EDF en Pyrénées et sur le Tarn. Ces moyens contribuent à limiter les conflits entre usages et à garantir l’eau nécessaire au bon fonctionnement du milieu. Au-delà des réserves hydroélectriques trois contrats de coopération mobilisent en partie des retenues hydro-agricoles sur les rivières Ariège (lac de Montbel), Arize (lac de Filhet) et Touch (lacs de Fabas, La Bure et Savères) et deux protocoles d’accords interbassins avec le Lot, le Tarn, l’Aveyron et la Gascogne.
L’effet positif des quelques rares pluies cet été s’estompe rapidement et la Garonne reprend un tarissement intense. La succession de vagues de chaleur et la très faible pluviométrie enregistrée sur les mois de juillet et d’août ont conduit à des déstockage records de plus de 45 hm3, soit près de 70% des volumes disponibles en seulement deux mois de campagne.
La vigilance de tous est de rigueur et le comité stratégique de gestion, qui s’est réuni le 11 août sous l’égide du préfet coordonnateur de bassin Adour-Garonne et du président du SMEAG, a révisé la stratégie afin d’adopter une gestion prudente : tenir les objectifs dans la durée pour sécuriser l’eau potable et éviter un épuisement prématuré des stocks. Les débits d’objectifs ont été révisé à la baisse afin d’'éviter l’atteinte durable des débits de crise en Garonne.
Zoom sur la Garonne amont
L’entrée en étiage de la Garonne se fait généralement autour du 15 septembre. Cette année, les déstockages pour tenir les débits en Garonne amont ont dû se faire de façon exceptionnelle au 15 août. Quelques épisodes pluvieux en août ont permis de remonter temporairement les débits. Mais la situation pour septembre octobre pourrait en l’absence de pluies se tendre et impacter le milieu.
La précocité des étiages de la Garonne est l’un des effets annoncés du réchauffement climatique. De la même façon l’augmentation de l’intensité et de la durée des étiages peuvent se cumuler. En 2011, les débits étaient restés sous les seuils objectifs jusqu’à la mi-octobre. Le soutien d’étiage limite l’érosion des débits naturels due au changement climatique, il s’agit d’une mesure d’adaptation.
Si l’on ne connait pas encore l’impact des sécheresses répétitives sur la biodiversité, le projet Sentinelle du climat conduit en Nouvelle Aquitaine fournit quelques indices sur le devenir d’espèces floristiques et faunistiques régionale face à ce changement climatique. La diversité des espèces sera répartie de manière différente sur le territoire : plus faible en plaine avec l’expansion de peu d’espèces et plus forte dans le Plateau des Millevaches et le massif pyrénéens qui seront les derniers refuges des espèces face au changement climatique. Un projet similaire est conduit en Occitanie pour extrapoler ces conclusions.
Vous pouvez voir le bulletin quotidien du fleuve sur le site du SMEAG : https://lnkd.in/eciJ7vvQ
Quelles conséquences au niveau de la biodiversité ?
Le stade le plus sévère est l'assèchement complet d'une partie du linéaire de cours d’eau, provoquant directement la mort d’espèces aquatiques peu mobiles et incapables de survivre au manque d'eau. La biodiversité est ainsi directement impactée par la réduction voire l’assèchement de cours d’eau qui naturellement ne rencontrent pas de telle situation sauf en secteur méditerranéen avec une biodiversité inféodées, riche et adaptée.
Le site Natura 2000 de la Garonne en Occitanie (FR7301822 ; Garonne, Ariège, Hers, Salat, Pique et Neste) correspond à l’aire de fréquentation historique du saumon atlantique. Il abrite plusieurs habitats naturels et espèces animales et végétales, aquatiques et terrestres, d’intérêt communautaire. Parmi les habitats prioritaires, on peut mentionner les forêts alluviales, les forêts de pentes, les sources pétrifiantes. Les espèces animales emblématiques du site sont notamment le desman des Pyrénées, espèce endémique, la loutre d’Europe, la cordulie à corps fin (libellule), plusieurs espèces de chiroptères, des poissons dont le chabot, la lamproie de planer, la grande alose.
Loutre d’Europe- Source : JP Malafosse
Ce sont donc tous les écosystèmes des cours d’eau du site de la Garonne (habitats et espèces) qui sont susceptibles d’être impactés par des étiages successifs et sévères et en premier lieu les espèces piscicoles.
L’augmentation de la température de l’air, qui influence celle de l’eau, la faiblesse des écoulements, le peu d’ombrage, une mauvaise alimentation du cours d’eau par les nappes d’eau souterraine, l’absence d’habitats refuge dans le lit des rivières (bonnes épaisseurs de graviers, sous-berges, …) entraînent un réchauffement des eaux et une diminution de l’oxygène dissous pour la faune piscicole. Dès 24 degrés (température de l’eau), la survie des salmonidés est menacée. Cette limite varie selon l’espèce et son stade de vie, les juvéniles étant plus sensibles que les adultes. Les poissons sont d’autant plus sensibles à la température de l’eau que ce sont des espèces à sang froid. En dessous de 5 mg/l, le faible taux d’oxygène dissous dans l’eau commence à impacter les espèces . Le seuil de 2 mg/L, est létal pour quasiment toutes les espèces. Lorsque les conditions ne sont plus favorables, les poissons peuvent tenter de se réfugier dans des zones plus profondes, ou proches d’émergences d’eau souterraine plus fraîche mais qui doit s’oxygéner. Néanmoins, plus la situation est critique et plus ces solutions sont limitées.
La mise en place du soutien d’étiage permet de soutenir les débits en Garonne et sur ses affluents comme la rivière Ariège dont cet été 70% du débit provient du soutien d’étiage
Toutes les autres espèces inféodées aux milieux aquatiques, des insectes aquatiques, aux oiseaux et rongeurs, sont également impactés par des étiages plus longs et plus intenses et répétitifs qui s’amplifient avec le dérèglement climatique.
Saumon Atlantique- Source : MIGADO
Et les zones humides dans tout ça ?
Les zones humides, par leurs diversités et les nombreux services qu’elles nous rendent, assurent des fonctions essentielles et contribuent à l’équilibre écologique du Fleuve. Ces fonctions essentielles appartiennent à trois types de catégories :
Elles assurent des fonctions écologiques car elles sont nécessaires pour de nombreuses espèces animales ou végétales et représentent un réservoir de biodiversité important. Pour les oiseaux, en France, 50% des espèces seraient dépendantes à ces milieux.
La deuxième catégorie concerne les fonctions biogéochimiques avec le stockage de carbone, l’épuration de l’eau et favorisant également la recharge sédimentaire.
Enfin les zones humides ont également des fonctions hydrologiques, jouant un rôle d’éponge et permettent de réguler naturellement les flux d’eau en période d’inondation ou de sécheresse.
Les zones humides participent donc au soutien d'étiage des rivières par l'effet retard qu'elles introduisent dans la restitution de l'eau soit directement aux cours d'eau dans leur partie amont, soit à la nappe phréatique à travers leur fonction de recharge de nappe. Les zones humides des Pyrénées permettent de freiner le tarissement naturel de la Garonne. Les débits les plus faibles en Garonne amont sont généralement observés sur les mois de septembre-octobre.
Dans le cadre de l’animation Natura 2000 et autres politiques menées sur le territoire, les acteurs mettent en place des actions visant à restaurer ces zones humides et ainsi les rendre plus fonctionnelles. On peut citer par exemple des restaurations de roselières, de ripisylve ou encore de bras morts sur la Garonne et ses affluents.
Par ailleurs la réglementation (code de l’environnement) et d’autres politiques protègent ces milieux. C’est le cas notamment du Schéma d’Aménagement de la Gestion de l’Eau (SAGE) de la vallée de Garonne approuvé en juillet 2020 qui au travers de sa règle n°1 interdit la destruction des zones humides identifiées.
Les zones humides sont de précieuses alliées car elles stockent une partie du CO2 responsable du réchauffement climatique tout en favorisant la régulation des sécheresses et des inondations. De plus, elles constituent des réservoirs de biodiversité dont l’importance s’avère croissante pour la survie de nombreuses d’espèces. La valeur de ces milieux est d’autant plus précieuse que la surface de ces refuges climatiques est limitée et tend à se réduire face aux nombreuses pressions humaines (pollution, urbanisation etc.). La multitude de bénéfices qu’elles produisent fait donc de leur sauvegarde, une solution sans-regret dans un contexte d’adaptation aux bouleversements climatiques.
Plus d’information sur les zones humides :
Guide zones humides du SAGE avec des exemples de restauration
Informations sur les services rendus par les zones humides du SAGE vallée de la Garonne
Edition de mars 2021 sur les zones humides
Exemple d’actions sur une ripisylve en bord de Garonne en Aquitaine
A SAVOIR : Le Plan d’action sécheresse (ou de crise) de l’État :
La menace de sécheresse, le risque de pénurie peuvent conduire les préfets, à limiter ou suspendre provisoirement des activités et usages de l’eau. Le franchissement de niveaux seuils de débit (objectif d’étiage, seuils d’alerte, seuils de crise) déclenche les mesures et actions prévues aux plans d’actions sécheresse de l’État. Plusieurs mesures de restrictions ont été prise cette année sur l’ensemble du linéaire de la Garonne ainsi que sur l’ensemble des activités (agricoles, eau potable, industries)
Pour aller plus loin :
- https://www.lagaronne.com/repere/gestion-detiage-gestion-de-crise.html
- https://www.lagaronne.com/etude/le-plan-de-gestion-detiage-garonne-ariege.html
- https://ariegenature.fr/zones-humides/
Pour plus d’information et d’actualités :
Reportage diffusé sur France3 sur le soutien d’étiage avec Jean-Michel Fabre et Nicolas Cardot : https://drive.google.com/file/d/1dwCIehgNbhjjc8PM3EQH5btPDAsrqPvw/view?usp=drivesdk